Une petite voix bien connue aime perturber le travail des écrivains en leur répétant inlassablement :
– Continue de travailler sur ce premier chapitre. Je suis sûre que tu peux encore l’améliorer.
Ceux qui succombent à cette voix font, refont, refont encore ce premier texte, sans en être jamais satisfaits. Englués dans leur insatisfaction, ils n’avancent pas dans leur récit.
Les personnes dotées d’un tempérament (excessivement) perfectionniste rencontrent souvent cette difficulté. Certaines travaillent toute leur vie à un même livre, sans jamais réussir à l’achever : elles recherchent une perfection qui n’existe pas.
Pour éviter de tomber dans ce travers, gardons en tête cette phrase d’Ernest Hemingway : « Nous sommes tous des apprentis dans un art où personne ne devient maître ». Autrement dit, ne cherchez pas à écrire un chef-d’œuvre !
Un conseil ?
Si vous vous savez très perfectionniste, imposez-vous un temps précis pour rédiger le premier jet de chaque chapitre. Lorsqu’il est écrit, relisez-le une fois, deux fois maximum, corrigez ce qui ne va pas… puis passez au chapitre suivant. Interdisez-vous de le relire dix fois !
Au fur et à mesure que vous allez écrire, vous allez progresser. Plutôt que de vous acharner sur votre premier chapitre, mieux vaut le retravailler une fois que vous avez terminé le premier jet de l’ensemble de votre récit : vous avez alors acquis de la pratique, qui vous rend beaucoup plus efficace et pertinent.
Ne restez pas bloqué sur vos premiers chapitres, même si vous ne les jugez pas bons. Continuez votre route. Vous y reviendrez plus tard.
Il me semble utile, ici, de rappeler une qualité commune à tous les écrivains publiés : tous ont su, à un moment, déclarer leur livre achevé ! Cette phrase peut sembler n’être qu’une boutade ou un truisme. C’est plus profond et complexe qu’il y paraît.
– Ne plus travailler sur un livre que l’on a pris beaucoup de plaisir à écrire, corriger, relire et relire encore, peut être un vrai déchirement. On a l’impression qu’une tranche de vie épanouissante et heureuse se termine. Les personnes et les lieux évoqués vous manquent. La déprime vous gagne.
Il s’agit d’une étape obligée que l’on peut dépasser en se promettant de bientôt partir pour une nouvelle aventure littéraire (l’écriture de nouvelles, d’un roman, d’un récit biographique sur un ascendant…), qui procurera autant de bonheur et d’émotions !
– Terminer son livre, le confier à un éditeur ou à un imprimeur, le laisser vivre sa vie auprès de ses lecteurs revient à ne plus en avoir la maîtrise, alors que « c’est votre bébé » et qu’il vous tient terriblement à cœur. Là encore, cette étape peut être difficile, comme il est difficile à certains parents de voir leurs enfants partir voler de leurs propres ailes.
De même que l’éducation que vous avez donnée à vos enfants avait pour objectif de les rendre libres et autonomes, votre projet, en écrivant votre livre, a été de le faire exister ailleurs que dans votre esprit et votre cœur : chez vos lecteurs. Il faut donc vous y résoudre… et vite partir sur un nouveau projet littéraire !
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